Interview exclusive : Christophe Lemaire, rédacteur en chef du magazine Tokebi.
Le magazine sorti en kiosque le 28 juin dernier et ses séries fraîchement sorties, Tokebi fait son entrée dans le monde du manga coréen ("manwha"). Une occasion pour BLAM! de poser quelques questions à son moteur principal, Christophe Lemaire.



Bonjour Christophe. Tout d’abord félicitations pour votre travail et bienvenue dans la grande famille de l’édition, les amateurs de BD que nous sommes sont ravis.
Quel est ton poste au sein des éditions Tokébi ? En quoi consiste ton travail ?
CHRISTOPHE: Je suis le rédacteur en chef du magazine Tokebi et directeur de collection. En tant que directeur de collection c’est moi qui gère les contacts avec nos amis éditeurs coréens, aidé par mon collègue HongJin Park – il parle coréen c’est plus pratique. Je sélectionne les séries qui me semblent intéressantes et négocie les contrats.
Pour le magazine, mon job de rédac’ chef consiste aussi à gérer les séries en prépublication et leur rythme de parution, ainsi que d’effectuer les choix rédactionnels, de maquettes, de promotion, etc...

Le choix d’éditer des auteurs exclusivement Coréens s’est fait comment ?
CHRISTOPHE: Ce choix est lié au label. Tokebi est un mot coréen. Petite explication sur le terme :
Le Tokebi est typiquement coréen et ne se définit pas facilement. Bien qu'il n'existe que dans les légendes, il est très présent dans les récits du passé et occupe une place importante dans le cœur des coréens.
Le Tokebi n'est pas un esprit. Bien qu'il soit une entité pouvant effrayer, il n'est pas réellement terrifiant. En fait, sa place serait quelque part entre l'esprit protecteur et le fantôme maléfique.
Les gens considèrent le Tokebi comme une créature mythique et bien peu d'éléments permettent de lui donner une origine ou apparence. Semblable aux fantômes par bien des façons, il n'apparaît que la nuit et disparaît dès l'aube au premier chant du coq. Il évite soigneusement les humains de même que les lieux d'activité. De plus, il n'existe aucune forme standard de Tokebi, bien qu'une certaine constance existe dans ses descriptions. Il se présente souvent sous l'aspect d'une flamme irréelle qui apparaît dans un éclair de lumière pour guider les gens à travers les ténèbres. Contrairement aux fantômes, les Tokebi sont la métamorphose d'objets utilisés par les humains et représentent une combinaison de l'essence humaine qui a imprégné l'objet et de l'objet lui-même.
Le Tokebi a aussi une personnalité qui se rapproche plus des humains que celle des fantômes. Ils aiment manger, boire, danser et chanter. Ils ont aussi un penchant pour les jolies filles. Cela ne les empêche pas de faire preuve de pouvoirs fantastiques puisqu'ils possèdent une force incroyable et une baguette magique, et ils peuvent donc réaliser des miracles.
Leurs principales matérialisations graphiques se font sous la forme de masques de toutes sortes. L’un d’eux a inspiré notre logo.

Est-ce définitif ou est-il possible que les éditions Tokebi s’étendent aux autres pays d’Asie ?
CHRISTOPHE: Nous avons signé des mangas mais ils sortiront sous un autre label. Nous surveillons de près la production chinoise, hongkongaise et taiwanaise mais ce n’est pas encore très mature, à mon goût du moins. A suivre...

Choi Il Ho, l’auteur de Omega dont le premier tome est sorti aux éditions Tokebi en juin 2003, confesse dans son édito qu’il a quelques craintes quant à « différence culturelle », selon ses propres termes. Autrement dit, il a peur que l’énorme différence de mentalité et de culture qui sépare l’Asie de l’Occident ne soit un obstacle à la diffusion et à la compréhension de son travail dans nos pays.
Quel est votre avis sur la question ?
CHRISTOPHE: C’est particulier à cette série car son récit se situe à un niveau très « spirituel ». Les esprits occupent d’ailleurs de nombreuses légendes coréennes. Nous avons eu un peu de mal à traduire ce manhwa car son fonds est très oriental.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que chez Tokebi, il y en a pour tout le monde ! Thriller fantastique, Science-fiction, Aventure, Fantasy, humour, etc.
Je ne connaissais pas du tout la BD coréenne et je dois avouer que je suis surpris d’autant de diversité, tant dans le dessin que dans les scénarii. Vous qui connaissez bien cet univers, pouvez vous nous expliquer quelle est la place qu’occupe la BD en Corée. La culture manhwa est-elle aussi importante que la culture manga au Japon ?
CHRISTOPHE: LEffectivement c’est un peu comme au japon. Nos amis coréens lisent beaucoup – même sur Internet ! Leur production reste cependant inférieure à celle des japonais. Ils éditent même un peu plus de manga que de manhwa chez eux. La proportion doit être de 65/35. Mais à mon avis cette tendance s’inversera d’ici à 2 ou 3 ans. En effet, les coréens ont un énorme potentiel et sont seulement en train de commencer à exporter leur production hors d’Asie. Ils vendent des droits depuis 1 ou 2 ans aux Etats- Unis et sont en train de signer un peu partout en Europe...

Comment s’organise le « recrutement » ?
Allez-vous sur place pour découvrir de nouveaux talents ?
CHRISTOPHE: Nous allons sur place 3 fois par an. Mais nous travaillons aussi par e-mail tout au long de l’année.

Parlons un peu du mensuel Tokebi. On connaît les difficultés que rencontre un mensuel BD lors de sa mise en circulation de nos jours. (Delcourt vient d’annoncer la fin de Pavillon Rouge après deux ans de bons et loyaux services). A votre avis cela est dû à quoi ? Cela ne vous fait pas peur ?
CHRISTOPHE: C’est vrai que la presse est un pari difficile. Les raisons sont diverses, mais j’ai souvent entendu dire que les lecteurs n’aimaient pas acheter 2 fois la même chose (ce qui est logique) avec les albums qui sortent après leur prépublication en magazine. Ma recette sera donc un peu différente. En effet, j’ai pris le parti de ne prépublier que les tomes 1 de chaque série (sauf Priest qui sera notre best, donc incontournable dans le mag) afin de les présenter aux lecteurs. Libre à eux ensuite de poursuivre la collection en album si le premier tome lui a plu.

Au sommaire de Tokebi mensuel des news sur l’actualité manhwa, des articles sur l’Asie, une rubrique jeux-vidéos et bien sûr des BD. Ces Bd justement ne sont pas les titres que vous éditez en album, comment cela se fait-il ? Est-ce que les titres seront toujours différents ou est-ce que plus tard les BD du mensuel seront éditées en album et inversement ?
CHRISTOPHE: J’avais la volonté de faire un lancement relativement important. Pour cela il fallait donc avoir des albums et un magazine, et le tout en même temps. Nous avons donc des séries qui sont sorties directement en album et il y en aura d’autres car la matière ne manque pas.
Pour le magazine, nous prépublierons donc les tomes 1 d’environ 6 nouvelles séries par an en plus de la régularité de Priest et Ragnarok.

Christophe, BLAM! te remercie de lui avoir accordé cette interview et j’espère que le public réservera un accueil chaleureux au manhwa !


Interview réalisée par Odin pour BLAM! (juillet 2003)


Pour plus d'infos...
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